Corée du Nord : la fermeté des Etats-Unis se heurte aux mises en garde russes

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Publié le 04/09/2017 à 7:28 - Mise à jour le 04/09/2017 à 7:28

Signe que l’unité internationale commence déjà à se fissurer, Donald Trump a confirmé le ton martial en vigueur à Washington depuis que la Corée du Nord a revendiqué, dimanche, l’essai réussi d’une bombe H, la plus puissante jamais testée par Pyongyang.
Le président américain, qui avait promis le mois dernier « le feu et la colère » à Pyongyang si ses menaces devaient se poursuivre, a ainsi annoncé mardi dans un tweet qu’il autorisait le Japon et la Corée du Sud à acheter des armes américaines « ultra sophistiquées ». Les Etats-Unis ont déjà menacé dimanche le régime de Kim Jong-Un d’une « réponse militaire massive ».

La Corée du Sud a de son côté lancé dès lundi des manoeuvres terrestres à tirs réels et la marine sud-coréenne a fait de même mardi dans l’espoir de dissuader Pyongyang de toute provocation en mer.

Mais les échanges de menaces se poursuivent : l’ambassadeur nord-coréen auprès de l’ONU à Genève, Han Tae Song, a assuré que les récentes « mesures d’autodéfense » de son pays étaient un « paquet cadeau » adressé aux Etats-Unis, qui en « recevront d’autres » s’ils poursuivent « leurs provocations imprudentes et tentatives futiles pour mettre la pression » sur la Corée du Nord.

Le Japon a revu à la hausse son estimation de la puissance de la bombe à hydrogène que Pyongyang a fait exploser dimanche : selon Tokyo, elle atteint 120 kilotonnes, soit huit fois supérieure à celle de la bombe américaine qui a dévasté Hiroshima en 1945.

« S’engager dans une hystérie militaire n’a aucun sens, c’est un chemin qui mène à l’impasse », a prévenu Vladimir Poutine depuis la Chine, où il a assisté au sommet des Brics qui réunit les puissances émergentes (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Tout en condamnant les essais nord-coréens, le président russe a estimé qu’une réponse militaire pouvait « aboutir à une catastrophe planétaire et à un grand nombre de victimes ».

Moscou semble rejoindre la position chinoise en faveur d’une « résolution pacifique » de la crise et d’une reprise de pourparlers avec le régime nord-coréen. Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a insisté sur ce point au téléphone avec son homologue américain Rex Tillerson, prônant « l’utilisation de moyens politiques et diplomatiques » et appelant Washington à « ne pas céder aux émotions et à garder sa retenue ».

Mais si M. Tillerson avait ouvert la porte à un futur dialogue ces dernières semaines, M. Trump juge désormais que « tout discours d’apaisement ne fonctionnera pas ».
Outre la pression militaire, les Etats-Unis comptent essentiellement sur l’adoption de mesures « les plus fortes possibles » contre Pyongyang. Washington souhaite ainsi négocier dans les prochains jours à l’ONU un nouveau train de sanctions dont il a pris l’initiative –le huitième– et le mettre au vote du Conseil de sécurité dès lundi –un appel relayé mardi par plusieurs pays, dont la France et le Royaume-Uni.

Ces mesures pourraient concerner les secteurs du pétrole et du tourisme ainsi que le renvoi en Corée du Nord de ses expatriés, après les sanctions adoptées début août à l’unanimité, visant à priver le pays d’un milliard de dollars de recettes tirées de ses exportations de charbon, de fer et de sa pêche.
Mais des obstacles remettent déjà en cause ce scénario.
« Le recours à n’importe quelles sanctions dans ce cas est inutile et inefficace », a ainsi balayé M. Poutine, dont le pays dispose d’un droit de veto à l’ONU tout comme la Chine, dont la position reste aussi incertaine.
Les Nord-Coréens « ne vont pas renoncer à leur programme » nucléaire « s’ils ne se sentent pas en sécurité », il faut donc « chercher à lancer un dialogue entre toutes les parties intéressées », a encore plaidé le chef du Kremlin.

Moins catégorique, l’ambassadeur russe à l’ONU a en tout cas estimé qu’un vote lundi serait « un peu prématuré ». Surtout, Moscou veut que toute résolution fasse « référence au besoin d’un dialogue politique basé sur les récentes initiatives », c’est-à-dire la proposition russo-chinoise d’un gel des manoeuvres militaires américano-sud-coréennes contre une suspension des programmes balistique et nucléaire nord-coréens.

Or lundi, les Etats-Unis avaient sèchement qualifié cette proposition d‘ »insultante ». « Quand un Etat voyou a une arme nucléaire et des missiles intercontinentaux pointés sur vous, vous ne baissez pas la garde », avait lancé l’ambassadrice américaine à l’ONU Nikki Haley.
L’unité du Conseil de sécurité est « absolument cruciale », a prévenu mardi le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres face à ces divergences, appelant les membres permanents (Etats-Unis, Russie, Chine, Royaume-Uni et France) à « se mettre d’accord ensemble sur une seule stratégie pour négocier » avec Pyongyang.

AFP

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