Cascades de crises en Nouvelle-Calédonie avant un troisième référendum sur l’indépendance

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La démission des indépendantistes qui a fait chuter mardi le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a ajouté une crise politique aux troubles économiques et sociaux de l'archipel, où un troisième référendum sur l'indépendance devrait se tenir d'ici 2022.

Publié le 04/02/2021 à 17:26 - Mise à jour le 05/02/2021 à 8:37

La démission des indépendantistes qui a fait chuter mardi le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a ajouté une crise politique aux troubles économiques et sociaux de l'archipel, où un troisième référendum sur l'indépendance devrait se tenir d'ici 2022.

Mardi, les cinq membres FLNKS (Front de libération nationale kanak socialiste) du gouvernement collégial ont claqué la porte, ce qui a de facto entrainé sa chute.

Ils ont tour à tour mis en cause « la dynamique institutionnelle en panne, les retards du budget, les difficultés de la collégialité » ainsi que le « processus de vente » de l’usine de nickel du groupe brésilien Vale « qui fait primer les intérêts des multinationales sans considération des aspirations des populations locales ».

Mais selon les observateurs, la démission du FLNKS est liée à sa volonté d’entraver le processus institutionnel qui doit permettre aux collectivités de valider la transaction entre Vale et le consortium Prony Resources.

La mouvance indépendantiste est farouchement opposée à la reprise de cet outil industriel par un consortium calédonien et international Prony Resources, dans lequel se trouve le négociant en matières premières Trafigura, et mène depuis plusieurs mois des actions de terrain.

Après avoir été prise d’assaut le 10 décembre par des émeutiers, l’unité est à l’arrêt et cible permanente d’exactions. 

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Ce dossier explosif a donné lieu à une escalade de tension entre les indépendantistes et l’Avenir en Confiance, coalition loyaliste majoritaire, qui a dénoncé « le terrorisme du FLNKS » et a, à son tour, organisé des opérations de terrain. 

Alors que le nickel est un enjeu éminemment politique – les indépendantistes considérant le minerai comme le socle d’une future indépendance – la reprise de l’usine de Vale, adossée au riche gisement de Goro, pourrait aboutir le 12 février, date présumée de l’échéance du compromis de vente.

Un nouveau gouvernement dans 15 jours

Conformément au texte de l’accord de Nouméa (1998), qui régit le territoire, un nouveau gouvernement sera élu « dans un délai de 15 jours ». L’exécutif est élu par le Congrès (assemblée délibérante), selon un scrutin de listes proportionnel.

L’exécutif sortant, mis en place en juin 2019, était présidé par le loyaliste Thierry Santa (Avenir en Confiance), mais les indépendantistes ont la possibilité de remporter la majorité et la présidence du prochain gouvernement. Pour ce faire, soit ils s’allient avec un petit parti charnière, L’Eveil océanien, soit les 3 élus (sur 54) de ce parti s’abstiennent.

« Ce qui est fondamental pour nous, ce n’est pas à qui reviendra la présidence, c’est de mettre en place un gouvernement de combat capable de relever les nombreux défis devant nous et de prendre de la hauteur vis-à-vis de la question de l’avenir institutionnel », a déclaré jeudi son leader, Milakulo Tukumuli, sans en dire plus sur ses intentions.

Cette crise intervient alors que le processus de décolonisation en cours depuis 30 ans en Nouvelle-Calédonie arrive à son terme. Le 4 octobre dernier, un deuxième référendum sur l’indépendance a été remporté d’une mince avance par les pro français (53,3%), en recul de plus de 3 points par rapport au référendum du 4 novembre 2018. 

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Un troisième et ultime vote sur le maintien ou pas dans la France devrait avoir lieu d’ici 2022. Les discussions avec le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, pour préparer les suites de cette échéance cruciale sont au point mort.

L’économie calédonienne est en outre en berne, en raison notamment des difficultés de la filière nickel. L’usine de Vale est arrêtée et la Société le Nickel, filiale du groupe français Eramet et premier employeur privé, pourrait se trouver en cessation de paiement dans les prochains mois. 

Bien que sanitairement épargnée par le Covid-19, la Nouvelle-Calédonie subit les conséquences financières et économiques de la fermeture et de la protection de ses frontières, qui devraient entrainer un recul du PIB de 5 à 7% selon les experts.        

Alors qu’il manque 10 milliards CFP (83 millions euros) de recettes pour équilibrer le budget 2021 de la collectivité, le vote de celui-ci a été reporté au 31 mars, dernier délai avant la mise sous tutelle de l’Etat. 

Quant aux comptes sociaux, ils affichent un déficit cumulé de plus de 25 milliards (208 millions euros), qui devrait continuer à se creuser du fait de la mise en chômage partiel d’environ 2.000 salariés et sous-traitants du nickel au cours des derniers mois. 

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