La Polynésie française est-elle particulièrement affectée par la hausse des coûts de production et de transport (aérien et fret) ? Pourquoi ?
« La situation géographique de la Polynésie française, très éloignée des marchés fournisseurs, implique un poids important des coûts de transports dans ses approvisionnements. Ce handicap structurel est amplifié par le fait que peu de routes commerciales maritimes desservent l’archipel.
Par ailleurs, eu égard à l’étroitesse de son marché (moins de 300.000 habitants), la Polynésie française ne dispose pas de toutes les structures productives permettant de satisfaire les besoins locaux. Elle importe donc la plupart des biens de consommation et des matières premières nécessaires aux quelques entreprises de transformation.
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Les hausses sur les marchés extérieurs, qu’il s’agisse des coûts de production, des prix des produits finis ou encore des transports, ont donc un impact direct et important sur le niveau des prix en Polynésie française.
C’est ce que nous appelons l’inflation importée qui pèse aujourd’hui sur le pouvoir d’achat des Polynésiens. »
Avez-vous des exemples de chiffres qui montrent ces augmentations récentes ?
« S’agissant du transport, pour les conteneurs en provenance d’Asie, le coût a progressé de 183% entre 2019 et maintenant, pour les 20 pieds (6 mètres) et de 215% pour les 40 pieds (12 mètres). Quand il s’agit d’un acheminement depuis l’Europe, ces mêmes coûts ont progressé respectivement de 24% et 13%.
Quant aux produits eux-mêmes, le même riz, en provenance du Vietnam est passé d’une valeur coût-assurance-fret (CAF) par kilo de 98 francs Pacifique à 104 FCFP (soit +7%) en six mois (de 0,82 à 0,87 euro).
Dans le même temps, la valeur CAF de l’huile de tournesol est passée de 177 à 385 FCFP le litre, soit plus de 100% (de hausse, de 1,48 à 3,22 euros) ! Il en va de même pour certaines matières premières telles que l’aluminium ou le bois.
Mais la hausse la plus impactante pour notre économie concerne les carburants: la valeur CAF de l’essence sans plomb est passée de 53 à 114 FCFP (de 0,44 à 0,95 euro) entre juin 2021 et juillet 2022, tandis que le gazole passait, durant la même période, de 50 à 117 FCFP (de 0,41 à 0,98 euro), soit une progression de plus du double.
(…) Nous avons pris des mesures fortes afin que ces hausses ne soient pas répercutées intégralement auprès des entreprises et des consommateurs. »
Avez-vous envisagé ou réalisé des actions pour limiter les conséquences de ces augmentations ?
« Concernant les hydrocarbures, nous disposons d’un fonds de régulation qui sert à lisser les hausses et baisses à l’importation et ainsi éviter les fluctuations des prix à la pompe en fonction des arrivages.
Mais ce fonds a, cette année, atteint ses limites tant les prix se sont envolés. Nous avons compensé les hausses: les prix sont restés stables entre février et juillet 2022. Cette stabilité a un coût: les dépenses liées représentent plus de 8,5 milliards (712 millions d’euros) pour 2022.
Nous avons, en Polynésie française, un dispositif permettant de rendre accessibles aux ménages les plus modestes les produits de première nécessité (PPN) tels que le riz, l’huile, les morceaux de poulet congelés (…) ou encore les produits ménagers de base (lessive, par exemple).
Ainsi, une cinquantaine de produits entrent sur le territoire en toute exonération de droits et taxes à l’importation, de TVA ou de toute autre taxe sur la consommation. C’est une première étape pour abaisser le coût d’accès à ces produits.
Fin 2021, nous avons également anticipé l’inflation mondiale qui s’annonçait en exonérant, dès décembre, de droits et taxes à l’importation une grande partie des matériaux de construction (ciment, fer, aluminium, bois…) et les matières premières destinées à être transformées par nos industries. »
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