Tentative de parricide : l’accusé schizophrène, reconnu responsable de ses actes, écope de 10 ans

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L’homme de 34 ans, schizophrène sévère, jugé par la cour d’assises pour tentative de meurtre sur son père a été condamné, mardi soir, à 10 ans de réclusion criminelle. Les jurés n’ont pas retenu l’abolition de son discernement au moment des faits et ont donc estimé qu’il était pénalement responsable de ses actes. L’avocat général a suggéré qu’il purge sa peine dans une « prison hôpital » en métropole.

Publié le 21/06/2023 à 7:53 - Mise à jour le 21/06/2023 à 9:31

L’homme de 34 ans, schizophrène sévère, jugé par la cour d’assises pour tentative de meurtre sur son père a été condamné, mardi soir, à 10 ans de réclusion criminelle. Les jurés n’ont pas retenu l’abolition de son discernement au moment des faits et ont donc estimé qu’il était pénalement responsable de ses actes. L’avocat général a suggéré qu’il purge sa peine dans une « prison hôpital » en métropole.

Pour trancher la question de l’éventuelle irresponsabilité de l’accusé, les conclusions des experts psychiatres étaient très attendues, ce mardi, au deuxième et dernier jour du procès. Elles n’ont pourtant pas permis de dégager de certitude.

Le premier a considéré que le discernement du trentenaire, jugé aux Assises pour une tentative de parricide le 8 mai 2021, à Papeari, n’était pas aboli au moment des faits et qu’il était donc en capacité d’être jugé. « Pour moi, ça me semble évident qu’il est accessible à la sanction pénale (…) Bien qu’il soit malade, il n’était pas en état de démence ». Le second en est arrivé à des conclusions similaires. Mais la troisième experte, a, au contraire, estimé qu’il n’était « pas conscient de ses actes » le jour du drame.

Les jurés s’en sont donc remis à leur intime conviction en s’appuyant sur les plaidoiries des avocats et les réquisitions de l’avocat général pour se forger une opinion.  Celle du représentant du ministère public, Jacques Louvier, était faite. Le trentenaire n’était pas dans un moment de folie lorsqu’il s’en est pris à son père.

« Il a considéré que son père l’attaquait car il allait le maîtriser (…) Pour rétablir cette égalité, il va prendre un couteau. Cela montre qu’il raisonne. Il sait qu’il est moins fort (…) On a quelqu’un qui comprend la différence entre le bien et le mal et l’on doit considérer que son discernement n’est ni aboli ni altéré ».

« Ce n’est pas un accident »

Le magistrat a également considéré que le fils avait bien l’intention de prendre la vie de la victime. « Il a déjà tenté de le tuer. Ce n’est pas un accident (…) ‘Tu as fait quelque chose de mal et tu dois être puni’. Je suis sûr qu’il est capable de le comprendre ».

Un point de vue à l’opposé de celui de l’avocate de la défense, Me Solenne Rebeyrol. « Est-ce qu’il a le contrôle de ses actes ? La capacité de se raisonner pour ne pas commettre l’acte ? Moi, j’ai une grande incertitude (…) A aucun moment il n’a voulu tuer son père. Il vouait se défendre.  Il s’est senti attaqué. Il a eu peur d’être battu. Pensez-vous sérieusement qu’il était en état de contrôler cet instinct de survie ? ».

Pour le père, la position était inconfortable tout au long du procès, lui qui est partie civile sans vraiment le vouloir. « Il a tout essayé. C’est un enfant malade au point qu’il ne sait pas comment réagir (…) Au bout d’un moment, c’est le fils qui ne supporte plus la contrainte du père (…) Le cadre familial ne peut pas tout porter. Et c’est le problème de ce dossier », a regretté son avocate, Me Isabelle Nougaro. 

Carences du système

C’est en effet le grand enseignement du procès. Les carences du système. Après avoir requis une peine de 10 ans de réclusion criminelle, Jacques Louvier a demandé que le trentenaire purge sa peine dans une « prison hôpital » en métropole, pour recevoir les soins adéquats. « La volonté n’est pas de le mettre dans un endroit et l’oublier (….) mais d’aller un peu mieux. Et pour ce faire, il faut passer par là », a-t-il dit.

L’avocate de l’accusé a déploré cette absence d’unité psychiatrique fermée, en Polynésie, qui a joué, selon elle, sur la décision de la cour. « Je vois mal comment il sortirait libre ce soir. Je regrette qu’il n’y ait pas d’institution capable de prendre en charge des pathologies comme celle de mon client. Si ces structures existaient, vous auriez peut-être d’autres choix que de l’envoyer en prison ».

L’incarcération en métropole, serait, en outre, synonyme de double peine : « il y aurait une rupture totale avec sa famille (…) Pensez-vous que cela lui ferait du bien ? », a lancé Me Rebeyrol.

Prostré tout au long des deux jours du procès, parfois presque allongé sur le sol, le trentenaire a difficilement pu être interrogé. « Si jamais tu sors, tu vas où ? Chez papa et Maman ? », lui a demandé la présidente de la cour. « Non. Je veux rester en prison. Je suis mieux. Il y a de la boisson là-bas, du Coca, du Fanta et du Sprite », lui a -t-il répondu avant d’ajouter, soudain exalté : « Madame la juge, je te jure devant Dieu, j’ai jamais vu mon visage ».

La cour a retenu l’altération du discernement au moment des faits et non l’abolition. Elle a suivi les réquisitions et prononcé une peine de 10 ans de prison avec un suivi socio-judiciaire de 10 ans, comprenant une obligation de soins. Quant à une éventuelle incarcération dans une unité spécialisée en métropole, elle ne pourra se faire qu’avec l’aval de l’accusé ou de sa famille.  

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